Une tablette développée sur fonds publics

blueblood |

Retenez bien ce paramètre nouveau, et majeur. Jusqu’à peu encore, l’industrie fonctionnait avec le logiciel suivant :
• Toute innovation était d’abord pensée, développée et commercialisée pour toucher une cible de professionnels, prêts à en payer le prix pour en bénéficier.
• Une fois atteinte une masse critique, accompagnée d’une chute des coûts de fabrication corrélée à la loi de Moore, le grand public pouvait bénéficier de cette innovation.

Il en a été ainsi ces dernières années de l’ordinateur personnel – dont le patron d’IBM pensait dans les années 70 que personne n’en voudrait à la maison – puis du téléphone mobile, et dernièrement de l’ordinateur portable. Le contre-exemple est le Segway, qui se voulait d’entrée de jeu destiné au grand public, et qui n’a jamais réussi à sortir d’une clientèle professionnelle, essentiellement d’agences de tourisme et de team-building.

Mais voilà que la donne change, et une fois n’est pas coutume, Apple est en pointe sur ce sujet.
Prenez le BlackBerry : coqueluche des businessmen, il est aujourd’hui largement battu en brèche par l’iPhone, pourtant conçu à l’origine pour le grand public. Quand le BlackBerry, pensé pour les pros, a ensuite développé des terminaux pour Monsieur tout le monde, avec plus ou moins de succès. Paradoxe ultime, le BlackBerry est aujourd’hui un produit d’entrée de gamme, offert avec tous les forfaits dès 20 euros par mois, quand l’iPhone ne se négocie pas à moins de 150 euros, et encore avec des forfaits à 50, 60, 70 euros.

L’iPad est l’autre exemple incontestable de cette évolution majeure. Pensé aussi pour le grand public, pas un jour ne passe sans qu’une entreprise ne décide d’en confier X milliers à ses commerciaux, ses ingénieurs, ses pilotes, avec des applications professionnelles dédiées, souvent capables de révolutionner le métier auquel elles se destinent grâce à l’expérience interactive et tactile offerte par la tablette d’Apple.

Aussi, apprendre aujourd’hui que des fonds publics, 7 millions tout de même, vont être débloqués par le FSI (fonds stratégique d’investissement) français, pour développer la Smart 4G Tablet, une tablette 4G à énergie solaire, peut laisser perplexe. Néanmoins, les parrains de cette future tablette ne sont pas des inconnus. Gemalto, leader mondial de la carte SIM et des produits télématiques associés, Archos, l’Astérix français du baladeur MP3 et des tablettes, et surtout Wysips (lire : Wysips : des écrans solaires pour smartphones), inventeur, français également, d’un film révolutionnaire permettant de transformer toute surface, même un écran, en capteur solaire.

Espérons simplement que cette alliance ne visera pas à produire sa propre tablette, à laquelle on peut prédire un avenir compliqué, mais bien à développer des technologies brevetables, que les géants et leaders du secteur voudront absolument acquérir pour gagner du temps, et gagner un avantage concurrentiel.

Un iPad, ou une Galaxy Tab qui se rechargerait tout seul tout le temps à la lumière du jour, ou tout au moins qui verrait son autonomie augmentée de seulement 50 % et ne consommerait plus rien en veille prendrait une sacrée avance sur ses concurrents.

La Smart 4G Tablet vise quant à elle l’autonomie énergétique totale. En soi, rien d’impossible, sachant que le moyen le plus simple pour atteindre cet objectif est de consommer un minimum, au risque de décevoir les utilisateurs avec des performances médiocres. Un peu comme les voitures électriques dont on nous dit qu’elles seront notre quotidien de demain, mais dont les premiers modèles « grand public », qui sortiront d’ici à la fin de l’année, comme la Twizy de Renault, ne dépasseront pas le… 80 km/heure, pour 7690 € quand même.

avatar edbattistini | 
Cette news m'a fait penser au TO7...
avatar RaZieL54 | 
Et avec un peu d'audace, on va bien finir par avoir une tablette doté d'un crayon optique et d'un clavier amovible en caoutchouc ;) Donc comme toi ca a ete aussi ma première réaction... le problème avec les êtres humains c'est qu'ils sont, normalement, doté d'un cerveau limbique lequel gère entre autre une fonction intéressante: la mémoire! Ironie a part, le probleme de l'innovation en France est a la fois structurel, culturel, administratif et politique bien avant d'être financier: soit on est une entreprise disposant de fonds propres adaptés a la R&D et alors on a accés en plus a des aides moyennant gynmastique acrobatique administrative, soit on est une startup et on va alors en Allemagne ou en Angleterre... Sinon l'exemple d'Apple qui va a l'inverse des pratiques du marché... heu comment dire, c'est aussi un peu le cas depuis bien longtemps dans pas mal d'autres secteurs, genre l'armee qui au lieu de fabriquer ses propres outils , les achete quitte a les adapter un peu... Ca n'a rien de nouveau, et c'est meme la tendance generale.
avatar Homer Simpson | 
"Une tablette développée sur fonds publics" ? J'espère que les bénéfices seront alors "publics" et non pas privés ! Et en cas de pertes, j'espère que ces gentils décideurs qui ont décidé de mettre la dedans des fonds publics sans aucune consultation publique (pour ne pas dire démocratique), paieront de leur poche. Car les "fonds publics", ce sont nos impôts.
avatar simon | 
J'ai répondu un peu plus bas, mais l'état n'a pas fait une demande pour avoir une tablette française. En gros, l'etat a une enveloppe de plusieurs milliards d'euros destinés aux entreprises "innovantes" françaises. Ces milliards sont dépensés sur des appels à projets (FUI, FSN, etc...), chacun ayant leur spécificité. Si tu as une entreprise qui a un projet innovant, tu peux déposer un dossier collaboratif (c'est le premier critère). Ce dossier sera examiné par les "experts" des poles de compétitivité, puis ensuite devant une commission de financeurs. Dans le cas d'un FSN, l'état finance à condition qu'il y ait des retombées économiques pour elle : % sur les ventes, brevet, etc... Malheureusement, ce n'est pas le cas pour ce projet qui a été déposé dans le cadre d'un FUI. Donc effectivement, si le projet capote, l'argent investi est perdu.
avatar Homer Simpson | 
Et si au contraire, le projet a du succès et rapporte de l'argent, l'Etat (càd nous) sera-t-il remboursé, voire touchera-t-il une part des bénéfices ? Ou bien est-ce un chèque en blanc donné à des entreprises privées ?
avatar Jdbouton | 
@marc_os Peut être que les emplois, les bénéfices qui supplémentaire, et tout ce qui entraine (nouveaux produits donc marketing, nouvelle structure, donc nouveaux bâtiments, donc construction), dynamisme d'une région, nouveaux laboratoires, donc recrutement d'ingénieurs, donc attraction plutôt que fuite de nos Cerveaux, serait beaucoup plus rentable que des retour sur bénéfice direct ;).
avatar -oldmac- | 
Archos ?? C'est sur que ça va être du haut de gamme alors ;)
avatar jegolu | 
@wolf Pendant des années j'ai utilisé des produits Archos, série AV. Avant les iBidules tactile, ils permettaient : magnétoscope numérique, disque dur, possibilité d'échanger des fichiers, videur de carte mémoire en natif sans accessoire, qualité des MP3 bien meilleure...mais pas l'assise financière d'Apple, ni le côté "in". C'est vrai qu'en France on ne sait pas innover, Minitel, TGV, SECU, Hifi... Quant à la notion de haut de gamme, je ne l'associe pas à un produit de diffusion de masse. Bonne soirée.
avatar -oldmac- | 
@notasa : 'Avant les iBidules tactile, ils permettaient : magnétoscope numérique, disque dur, possibilité d'échanger des fichiers, videur de carte mémoire en natif sans accessoire, qualité des MP3 bien meilleure...mais pas l'assise financière d'Apple, ni le côté "in". ' Rien a voir avec le fait qu'Archos est encore plus pourri que le moins bon cloneur chinois. Qu'Archos n'aie pas les moyens de ses ambitions, c'est un fait, mais surtou Archos rogne sur la qualité des composants, et après sur le service après vente, pour essayer de s'assurer un peu de marge. Apple n'a pas toujours été la première capitalisation boursière, mais jamais Apple n'a proposé des bouses comme Archos peut le faire, en méprisant leurs clients.
avatar simon | 
Suivant de près l'activité des pôles de compétitivité français je voudrais juste ajouter quelques précisions. A propos des 7 millions : ça c'est le cout total du projet, au mieux l'état (collectivités and co) va financer 45% du projet (en fait beaucoup moins). Précisions sur le financement: pour les PME le financement est de 45%, pour les grands groupes (genre gemalto) c'est 25%, les labos 100%, etc... Donc en gros, si le cout pour Archos est de 1 million d'euros, l'etat va les aider au mieux à hauteur de 450 000 euros. J'oubliais, quasiment chaque année, Archos dépose un dossier de tablette. L'état finance l'innovation, donc les entreprises françaises en "profitent" et elles ont bien raison.
avatar xtyou | 
Sceptique je suis. '.'
avatar ijon971 | 
Tout à fait Fabinou. On se moque, parfois avec raison, du plantage de certains investissements publics français. C'est vrai qu'en France on a collectionné quelques belles gamelles en informatique, mais on a connu aussi pas mal de succès en aéronautique, dans le spatial, dans les transports ferroviaires, l'énergie, les télécom; etc.... Il ne faut donc pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Dans la vaste compétition internationale d'aujourd'hui, les occidentaux ne s'en sortiront que par des efforts R&D accrus, un volontarisme des états et gvts et, évidemment, des prises de risque. On oublie un peu facilement que si les US pèsent autant dans l'informatique mondiale, ce n'est pas dû seulement au dynamisme de leur entreprises privées et des "capital riskeurs" mais aussi aux efforts consacrés par l'état fédéral, notamment au travers de facilités administratives, de subventions et de grands contrats. 2 exemples : 1) pourquoi les US sont aussi forts en informatique de haute performance ? c'est parce que l'état fédéral a identifié depuis longtemps ce secteur comme stratégique et le finance fortement, notamment au travers de gros projets institutionnels. 2) pourquoi telle start-up pointue du logiciel s'était retrouvée au bout de quelques années d'existence à attaquer un marché mondial ? c'est parce ce qu'elle avait pu réaliser un bon produit pour le compte d'un sous-traitant d'un donneur d'ordre qui avait décroché un gros contrat de la défense. Ce produit originellement financé par les deniers publics avait permis ensuite à cette start up d'être propulsé sur la scène internationale. Dans d'autres domaines, les US connaissent aussi des échecs (Ils viennent d'en connaitre un joli dans le domaine de l'énergie solaire - voir l'affaire Solyndra). On n'est donc pas les seuls à savoir se planter... Il n'y a que ceux qui ne font rien qui ne se plantent pas.
avatar MA2T | 
Pour le projet en soit; je me rappelle avoir commenter une publication portant sur les nouvelles technologies de l'iPhone 5, suite a une lecture précisément dans capital d'une sortie a l'automne d'un smartphone équipé de cette technologie a écran solaire, smartphone commercialisé d'après eux par une grande marque. Si c'est une des nouveautés de l'iPhone, alors il prendrait un grand avantage face aux autres je penses, et j'aimerais que ce soit le cas d'ailleurs :)
avatar quetzal | 
Ou-là-là! Ça va pas être facile de ne pas toucher aux brevets déjà existants!... Va falloir TOUT réinventer... ou passer à la caisse!
avatar tipablo | 
Thomson T07/70 Thomson MO5 Exelvision EXL100 Squale Hector HRX Tous tombés au champs d'honneur.
avatar rico75mail | 
7 millions d'euros? C'est pas une goutte d'eau? Ca ne doit même pas correspondre au budget dépôt brevet annuel d'Apple. Cette initiative est vouée a l'échec avant même de commencer pour sous capitalisation évidente. La somme bien qu'importante pour un particulier est ridicule pour un tel projet. Manifestement pas suffisante pour une r&d correcte et dépôts de brevets. Sans compter les moyens nécessaires à la fabrication et à la commercialisation. Pour s'assurer la disponibilité des composants Apple donne plusieurs milliards à ses fournisseurs. Un tel projet pour avoir une seule chance de voir le jour devrait être conçu comme Airbus et recevoir des milliards pour commencer. Encore faut-il pour cela une vision et une capacité à concevoir un produit innovant voire révolutionnaire. Avant de me lancer la dedans je méditerai sur les échecs de RIM et autres HP, Nokia et même Microsoft. Ca ressemble a une pathétique tentative dune entreprise au bord du dépôt de bilan pour essayer de tenir encore un peu à l'aide de subventions d'état. Je me demande bien quels spécialistes des tablettes peuvent accorder de telles aides?
avatar pl1997 | 
On peut déjà prédire l’échec total de cette tablette. Bien une idée de bureaucrates français ça. Ridicule. Mais gageons que certains vont s'en mettre pleins les poches.
avatar RaZieL54 | 
Le grand esprit en question que je suis a vos yeux a tenté au sein d'une équipe compétente, innovante et acharnee, et pendant 5 ans de développer un projet porteur de plusieurs brevets technologiques et économiquement (tres) viable. On voulait le faire en France, on a échoué, comme nombre (enfin la majorité) d'équipes et de collègues. Moralité, on a changé de directeur, lequel nous a dit "En France, mais vous êtes fous! Je m'engage pas la dedans", et six mois plus tard le projet est capitalisé et se développe en Angleterre! "c'est que les éventuels investisseurs ne pensent pas/plus en terme de "patrie" Heu si pour la France ils y pensent et c'est même une sacre contrainte, on en a entendu des "Vous tenez vraiment a rester en France, parce que ça va être compliqué dans ce cas" ou encore "En France, non c'est un marché sur lequel on n'intervient pas" Le plus beau qu'on ait eu c'est "En France?, pourquoi pas, si on commence par monter la société en Angleterre, on peut faire a terme une filiale commerciale en France" "Les investisseurs sont sans Pays Fixe, et sans patrie." Oui enfin on en trouve surtout dans les pays angosaxon qui font autre chose que tergiverser apres 5 audits pour en avoir un 6eme... C'est plutot, "votre projet est viable, voila le fiancement, au boulot!" " Ils se foutent royalement de monter des pôles de compétitions nationaux..." Ca c'est sur, d'autant plus qu'il faut passer alors par une couche d'administration française supplémentaire... Par contre regardez un peu le modèle américain, allemand ou encore suisse... Les universités travaillent (vraiment) en collaboration avec l'industrie. Et finalement, on ne croit pas que l'on est incapable d'innover en France: on est confronté a une situation ou il y a des chercheurs et des ingénieurs compétents, créatifs, drebrouillards et des entrepreneurs aussi visionnaires que pragmatiques qui se retrouvent face a un mur d'imbécillités étatiques aussi décourageant et d'une administration hautaine et incompétente...
avatar YHVH | 
Vous écrivez "7 millions tout de même", mais c'est pratiquement rien. Le budget recherche et développement d'Apple est de 1800 millions d'euros annuel, celui d'Archos est de 8 millions. Avec 7 millions, vous ne pouvez accoucher que d'une souris, vous pouvez payer 30 ingénieurs pendant un an avec l'infrastructure, mais à mon avis c'est insuffisant pour développer un produit aussi complexe. Ce budget ne permettra que de faire un prototype. Certainement que la meilleure solution sera de vendre la technologie obtenue. Mais je doute qu'Apple ou Samsung achètent ces brevets, Samsung copiera sans vergogne, Apple innovera en contournant les brevets quitte à omettre certaines fonctionnalités. Le seul débouché repose donc sur les épaules d'Archos, qui pourrait prendre une avance en se différenciant avec le solaire et un achat massif des tablettes Archos par les administrations françaises (écoles) pour assurer un premier débouché (le nouveau TO7 ?).
avatar Thunderfury | 
Vu la surface d'une tablette, l'intensité du rayonnement solaire (ou de l'éclairage) et le rendement des techniques photovoltaïques...Ite missa ect: ça sent le gadget pompe à phynance (publiques) à plein nez.

CONNEXION UTILISATEUR